Et c’est parti. Il est 7 heures. Le temps est gris et le ciel
plombé. L’humeur à l’unisson, entre pénombre et sommeil. Les premiers
kilomètres dévoilent une route bien peu conforme à nos attentes, à nos
espérances, à nos rêves. Rien à voir avec la côte nord de San-Francisco. La
brume et la fraîcheur vont s’estomper petit à petit pour laisser place au
soleil. Il faudra toutefois attendre le milieu de matinée et la pause à
Santa-Cruz pour se réchauffer.
Nous sommes arrêtés sur la jetée qui prolonge la
ville sur la mer. Visiblement une station balnéaire sans grand intérêt de prime
abord.
On arrive vers midi à Monterey, la ville que devait affectionner
tout particulièrement John Steinbeck pour qu’il en fasse le cadre de tant de
romans.
Nous déjeunons chez Rosine, petite pensée pour ma sœur.
Marie-Claude prend une
photo du restaurant. Cela me rappelle un autre voyage, en Martinique et un
autre magasin à l'enseigne "chez Rosine".
En haut de la rue, la Old Custom House, célèbre
pour avoir été le lieu où John Drake Sloat, en 1846, a déclaré américaine la Californie en hissant un "stars and stripes" du coup obsolète. Je cherche vainement l'Adobe House, l’hôtel qu’occupa Robert Louis Stevenson pendant son séjour ici. Je tombe par contre sur la vieille prison et du coup, sur des histoires du passé… Notamment celle d'un vrai Zorro qui aimait trop les femmes.
Le très
honorable Tiburcio Vasquez fut un bandit notoire de Californie au milieu du
XIXe siècle. Il soignait son image et se faisait passer pour un Robin des Bois
hispanique dans un pays nouvellement conquis par les États-Unis (1847). La
tâche était aisée, il lui suffisait de s’attaquer aux colons américains qui
avaient spolié les mexicains.
Wasquez est né à Monterey en 1865 dans une grande famille espagnole.
Son arrière-grand-père fut l’un des tous premiers colons arrivés en Californie
en 1776 avec le conquistador Juan Bautista de Anza[1]. Il eut une jeunesse
studieuse, savait lire et écrire, parlait espagnol et anglais, dansait et
jouait fort bien de la guitare. Mais à 17 ans , alors qu’il participait à un
bal, une rixe dégénéra et se termina par le meurtre d’un certain William
Hardmount, l’agent de police local. L’un des protagonistes de la bagarre, Jose
Higuera, qui faisait partie du groupe d’amis de Wasquez fut lynché le
lendemain. Wasquez, alors s’enfuit de Monterez et rejoignit la bande de
malfaiteur que dirigeait son cousin, Anastazio. Dès lors, la vie de Wasquez
bascule dans le crime, les cambriolages, vols de chevaux et de bétails, et
autres brigandage. Il était également un homme à
femmes. Et le fait que nombre de ses maîtresses
fussent mariées, lui vaudra une féroce inimitié des époux trompés. En 1873, son
gang attaque une boutique de la bourgade de Tres Pinos— aujourd’hui Paicines—et vole 200 $ d’or. Une fusillade éclate
et trois passants innocents sont mortellement touchés. Dès lors, il est
recherché activement d’autant que le gouverneur de l’époque, Newton Booth, fixe une prime sur la tête de 15 000$ - une somme incroyable pour l'époque. Le gang réussit à se cacher pendant 6 mois avant que l’un de ses propres membres, Abdon Leiva, ne se
rende à la police et le trahisse.
L’attrait de la récompense n’était pas la seule raison de son geste. On lui avait promis l’amnistie et il avait été cocufié par Wasquez.
Wasquez
plaida une juste cause, le lutte contre les spoliations et les
discriminations que les américains faisaient subir aux mexicains. Si cela fut bien
perçu par sa communauté, surtout les femmes, il fut néanmoins condamné à mort
et fut pendu en mars 1875. Mais depuis lors, son fantôme hante la vieille
prison de Monterey.
Wasquez
a été le prétexte d’un épisode de la série TV « Stories of the
Century » Saison 1, Episode 14 du 23 avril 1954. Le film avait été réalisé
par
William
Witney, sur un scenario de Maurice Tombrage avec les acteurs Jim Davis, Mary
Castle, et Anthoniy Caruso jouant le rôle de Wasquez
Pour en
terminer avec cette histoire, la prison, construite en 1854, existe toujours,
avec ses 6 cellules… et son fantôme.
Il est à noter qu’elle
« accueillit » pendant quelques jours, Eddie Romero, un
« paisano » arrêté pour avoir poignardé un de ses amis lors d’une
dispute d’ivrognes. Eddie Romero est devenu le modèle de John Steinbeck pour le
personnage de Pilon, l’un des joyeux drilles du roman « Tortilla
Flat ». Quand le roman devint film, c’est à Spencer Tracy, que fut dévolu
le rôle de Pilon.
Monterey,
c'est aussi l'un des berceaux du rock, avec le fabuleux festival
international de 1967. Janis Joplin, Jimi Hendrix, Otis Redding, The Who.
Excusez du peu.
Il est
temps de reprendre la route, et j’espère, celle de la côte et non cette infecte
highway (La 101) qui la jouxte.
A
quelques kilomètres au sud nous arrivons à Carmel, une station balnéaire chic,
connue pour ses galeries d'art et ses boutiques de luxe. Clint Eastwood en fut
le maire deux années durant et du coup quelques-uns d’entre nous se sont
affolés et tout excités, ont suggéré d’aller le rencontrer dans sa propriété qui
s’avère (bien entendu) être tout simplement un hôtel et non une résidence. Faut
quand même pas rêver ! Il y avait pourtant d'autres choses
plus intéressantes à voir. Bon, on ne va pas polémiquer sur les
valeurs et les centres d'intérêts de chacun... Sauf que l'on perd un temps
précieux...
Enfin la
route côtière ! De Carmel à Big Sur, rien à dire, si ce n’est une pensée
pour Henri Miller. Il avait raison de vivre là, le bougre. C’est tout simplement
extraordinaire. La state One procure un plaisir de conduite et un enchantement
pour le regard.
Le
plaisir est intense, mais pour rejoindre notre destination il faut rouler, rouler, rouler.
C’est vraiment gâcher le plaisir.
Le désir de s’arrêter est contré sans cesse
par le temps qui s’écoule.
La nuit tombe et du coup la magie augmente pendant ce laps de temps rare et précieux où la lumière s'estompe. Toute la diversité minérale donne des lumières et des couleurs splendides que renvoie avec abondance l'océan.
Mais
pourquoi donc vouloir aller toujours plus loin !!!! La Pacific Coast
Highway (la PCH pour les intimes) mérite la nonchalance et non cette
abrutissante conduite.
Il aurait été judicieux d'en faire moins et plus
lentement…
Lorsqu’on
arrive à San Luis Obispo, on tombe de fatigue. Il fait nuit noire. Nous aspirons tous à avaler le dîner et aller se coucher. Le blog attendra...
Et les vidéos tournées avec la GOPRO nécessitent d'être montées. Donc elles seront là, mais je ne sais pas quand.
A bon entendeur...
[1] Qui
fut le premier à explorer l’Arizona et la Californie avec une troupe d’une
vingtaine d’ hommes seulement.
Comme d'habitude tu es parfait dans tes commentaires.
RépondreSupprimerBises à MC et toi
AP et JM
Merci AP, c'est toujours un plaisir de lire tes commentaires flatteurs.
RépondreSupprimergrosses bises à vous deux et à très bientôt